Avis n° : 21/2024
Projet de loi du pays portant modification du code des postes et télécommunications en Polynésie française
Commission :
Économie
Avis :
Avis favorable
Rendu le :
07/05/2024
Rapporteur(s) :
Madame Maeva WANE et Monsieur Patrick GALENON

La Polynésie française, de par sa situation géographique au carrefour des grands pays du Pacifique, comme de sa configuration géographique liée à la dispersion de ses archipels, présente des avantages comme des inconvénients en matière de télécommunications internes ou extérieures.

 

Longtemps, le monopole de l’opérateur historique a été le moyen de contrôler ces télécommunications tout en permettant, autant que possible, leur accès aux populations les plus éloignées de Tahiti. 

 

Pourtant, aujourd’hui, cette situation doit évoluer tant au regard de l’intérêt croissant que présente la Polynésie pour des opérateurs extérieurs, que pour les opérateurs locaux, et le développement économique que pourrait susciter la venue de nouveaux intervenants. 

 

Néanmoins, le projet de loi du pays n’apporte, pour l’heure, qu’une précision sur la notion d’opérateur de télécommunications extérieures afin de permettre aux opérateurs non polynésiens de fournir un service de transmissions de données, vers ou depuis la Polynésie française. 

 

Si les rédacteurs du projet ont insisté sur la nécessité de faire évoluer la réglementation au regard du monopole actuel de l’opérateur historique, le CESEC constate qu’aucune amélioration directe pour le consommateur polynésien n’est constatée dans l’immédiat. 

 

Le CESEC s’interroge sur les évolutions bénéfiques que pourrait apporter l’arrivée de ces nouveaux câbles tant pour les entreprises que pour les particuliers.

 

En effet, les annonces d’installation de « Data Center » ont été contredites par certains professionnels auditionnés par la commission en charge de l’examen du projet de loi du pays. La seule certitude tient à la nécessaire installation de stations physiques d’atterrage afin de connecter les câbles. 

 

Pour l’heure, et comme l’ont confirmé les rédacteurs du projet, l’objet du texte soumis à l’avis du CESEC est simplement de permettre à de nouveaux opérateurs extérieurs de se raccorder à la Polynésie française, ce qui est actuellement interdit par le monopole de l’OPT sur les télécommunications extérieures.

 

L’opportunité que représente, pour la Polynésie française, l’installation de géants des technologies comme Google, et d’autres à venir, ne devrait pas pour autant occulter la nécessité de favoriser une saine concurrence entre les opérateurs locaux et le désenclavement numérique des archipels éloignés, au bénéfice de l’ensemble des polynésiens.

 

Pour ce faire, le CESEC recommande :

  • que les infrastructures locales, financées en partie par le contribuable polynésien, soient exploitées de la façon la plus efficiente possible ;

  • que le Pays réduise la fracture numérique existante en autorisant  l'importation et l’utilisation de matériel de connexion satellitaire en faveur des archipels éloignés et des zones non connectées, des navires de pêche, des voiliers ;

  • qu’un bilan des opérations d’installation des opérateurs extérieurs soit effectué de manière régulière et transparente ;

  • de permettre aux opérateurs privés locaux de disposer des capacités supplémentaires apportées par les nouveaux opérateurs extérieurs aux mêmes conditions que l’opérateur public, afin d’éviter une rupture d’égalité ;

  • qu’une fiscalité appliquée aux données transitant par le Pays soit étudiée, à l’instar de la « taxe sur les services numériques » mise en place en métropole ;

  • que la situation juridique de la délégation de service public octroyée par l’OPT à ONATI soit régularisée préalablement à l’adoption du présent projet de loi du pays ;

  • que la plus grande transparence soit assurée, y compris auprès des opérateurs locaux, dans la fixation des tarifs de connexion sur la partie du réseau de l’opérateur extérieur au bénéfice des opérateurs locaux ;

  • qu’une information complète et claire soit donnée à la population sur les coûts d’installation des infrastructures existantes, leur amortissement, leurs coûts de fonctionnement et d’entretien ;

  • de séparer la fonction de régulateur de tout lien tant avec l’opérateur historique qu’avec les services du Pays. Il recommande qu’une autorité administrative indépendante, disposant d’une expertise, d’une impartialité, d’un large pouvoir de contrôle et de sanctions soit mise en place, à l’instar de ce que le Pays envisage dans le domaine de l’électricité ;

  • que les taxes et redevances soient fixées de manière à respecter une égalité de traitement pour les opérateurs extérieurs, tout en assurant des recettes pour le Pays.

 

Ainsi, sous réserve des observations qui précèdent, le Conseil économique, social, environnemental et culturel émet un avis favorable au projet de loi du pays portant modification du code des postes et télécommunications de la Polynésie française.